Restaurant – Cuisine moderne – 50 à 100 balles par tête
J’ai toujours trouvé ça un peu chiant, le 9e arrondissement. Avec ses bureaux et ses restos du midi calibrés sur la taille des tickets restau, ses afterworks à « SoPi » (South-Pigalle, chez les connards), et ses rues toutes propres et pour tout dire un peu déprimantes, le quartier m’a toujours fait figure d’un coin pour bourgeois qui n’assument pas de vivre plus à l’ouest pour des raisons de street cred.

Soyons honnête : c’est un peu le cas de Cuisine. On a une carte du 10e mais une addition du 8e. Heureusement qu’on y mange bien, parce que sinon, on se serait pas donné la peine de se trainer jusque cette devanture 70’s – CUISINE qu’elle dit, en police de caractère Banco – dont on pousse la porte pour tomber sur une petite salle aux inspirations tout aussi rétros. L’ambiance est sympa, la lumière tamisée, aidée par les murs couverts de miroirs, on aperçoit derrière le comptoir, la cuisine.
La carte, dressée par le Chef Takao Inazawa, revisite avec talent des classiques européens (le jour de mon passage : lièvre à la Royale, blanquette de veau, tripes à la romaine …) et asiatiques (ochazuke, ankimo, xiao mai), en format entrées/plats/desserts sans menus. Et c’est vraiment bien : les plats sont équilibrés, à l’image de cette salade de poulpe, puntarelle, umeboshi, poireau, céleri, coriandre, wakame, wasabi dont on se dirait qu’elle est foutraque si elle n’était pas si fichtrement réussie en matière d’équilibre des goûts. D’une manière générale, les assiettes montrent pas mal de technique, un peu de créativité, des inspirations japonaises et un bagage culinaire solides pour le Chef et son second.
La blanquette de veau (de lait du Perche, pour les généalogistes) est simplement un grand moment. On devine que la sauce est montée avec un jus travaillé aux champignons et l’assiette est servie avec ses légumes glacés et fondants et un riz aux moules pour le supplément umami. On se demande rapidement, après avoir tapé dedans, comment faire durer encore ce câlin, une fois que la sauce sera finie. On oublie la viande, finalement pas si importante dans ce plat, pour tenter de maximiser le nombre de bouchée qu’il restera à saucer, on économise, encore un peu, avant l’inexorable assiette propre et sa triste réalité : yen a plus.
L’addition, elle, va vite : 15 balles l’entrée, entre 25 et 50 euros le plat, et encore un billet de 10 si t’as le bec sucré. Malgré un service cyclothymique, tu ressors plus léger de 60 euros par tête en moyenne, et tu n’as pas encore bu une goutte de pinard.

Et ce serait bien dommage, car la sélection est intéressante ! Le sommelier Benoit Simon s’est penché sur le sujet et propose une carte variée. Comme cela devient malheureusement assez banal, difficile d’y trouver une bouteille à moins de 40 euros.
On ressort de Cuisine avec finalement plus de questions qu’en y entrant : C’est quoi la puntarelle ? Combien a fait LREM dans le 9e ? Aimé Jacquet avait-il tort ? Mais qu’a-t-il fait à son poulpe pour qu’il soit aussi tendre ? Si Cuisine était plus près de chez moi, est-ce que le monde serait meilleur ?
CUISINE
50 rue Condorcet
75009 Paris
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